Voilà, désolée pour le retard, j'étais chez mon père !
Chapitre 1 : L'ombre qui me recouvre.
Ah, qu'elle était belle... Ses longs cheveux blonds cascadaient dans son dos et semblaient le narguer. Ou peut-être les secouait-elle ainsi pour qu'il y passe sa main ? Les filles sont un mystère.
Elle s'appelait Jess. Ou Jenn. Impossible de se rappeler. Dans tous les cas, il en était fou amoureux. Fou amoureux de sa couette brillante, fou amoureux de ses yeux turquoises, fou amoureux de sa peau lisse et claire... Il soupira d'adoration pour sa voisine de devant.
De nouveau, elle agita de la main ses cheveux. Devait-il céder à la tentation d'en éprouver le satin ? Ah, Jess... ou Jenn.
Au bureau voisin, une dénommée Olympe lui jeta un regard dégoûté. Dire qu'il y avait moins de deux jours, ce bellâtre stupide lui courrait après, et le voilà qui bavait désormais sur Mélissa. Les garçons étaient, de nature, incompréhensibles. Mais celui-ci battait des records d'imbécillité. Mais ce n'était pas son problème, après tout. Il avait bien poursuivi Pauline, une pure bombe, des jours durant, étant tombé amoureux pour la seule raison qu'elle lui avait un jour prêté un crayon pendant un examen. Et l'avait finalement délaissé pour elle, Olympe.
Luffy ne se lassait pas de contempler la queue de cheval de sa bien-aimée. Celle-ci devait se la brosser longuement le matin... avec douceur...
Le professeur, un vieil homme qui n'attendait que la retraite, appela au tableau une certaine Cristal. Celle-ci, albinos, se leva avec maladresse et se dirigea malencontreusement vers l'équation à résoudre. Se faisant, elle obliqua un coup d'oeil terrifié sur la classe. Aucun de ces détails n'avait échappé à Luffy.
Il avait soudain changé du tout au tout de mentalité.
Comment se faisait-il qu'il n'avait jamais remarqué avec quelle grâce naturelle se mouvait la pâle Cristal ? Comment avait-il pu être si aveugle pour n'avoir point vu qu'elle était l'amour sa vie ? Sa moitié ?
Sa longue tresse de couleur presque immaculée qui dansait sur ses épaules ! Sa peau translucide qui reflétait la lumière ! Ses yeux vermeils qui l'avaient fixé durant une demi-seconde...
Il baissa la tête, plus lucide. Il l'avouait : il tombait trop facilement sous le charme, et ce pour un moindre détail. C'était honteux d'aimer une fille à l'autre. Ce n'était même pas de l'amour. Peut-être un besoin d'affection. Dans tous les cas, il pensait vraiment les avoir aimées. Toutes ; Charlène, Fleur, Jessica, Holly, Carmen, Pauline, Olympe, Jess ou Jenn, Cristal... et d'autres.
"Après tout, c'est quoi, l'amour ?" se demanda-t-il, l'air mélancolique, se balançant sur sa chaise tandis que Cristal trébuchait en retournant à sa place. "Juste une succession de mécanismes dans le cerveau, juste un sentiment créé par l'esprit... rien de matériel."
Il soupira et concentra son regard sur la belle albinos, et celle-ci le captant rougit jusqu'à la racine. Lui souriant, il mit de côté ses pensées bien trop sérieuses et commença à réfléchir sur le moyen d'approcher la timide Cristal.
***
Zoro, par bien des cas, était l'exception qui confirmait la règle. Il était bandit, mais ne pillait pas les villages. Il était pirate, mais ne tuait pas. A vrai dire, la seule chose qu'il piratait se résumait aux ordinateurs de compagnies fortunées. Mais bien sûr, techniquement parlant, il était un pirate... des temps modernes. Le Robin des bois de son temps. Volant, via un disque dur ou par lui-même, les riches, et donnant aux pauvres. Il en aurait presque été fier, si ça n'avait pas été pour ses propres intérêts.
Après tout, être généreux avec eux n'était qu'un fait pour soulager sa conscience. Tout ce qu'il volait, c'était moitié du butin pour lui.
Zoro se décolorait les cheveux en vert punk, ce qu'il n'était pourtant pas. A dire vrai, les gens qu'il côtoyait n'étaient même pas sûrs que ce soit une couleur.
Zoro, aussi, était un génie de l'épée. Courtes ou longues, ses lames portaient toujours sur l'ennemi qui l'attaquait. Car Zoro, surtout, avait énormément d'ennemis ; des personnes qui en voulaient à sa peau. Des tueurs à gages, des petiots cherchant embrouilles, des escrimeurs renommés venant le défier. Il ne savait plus ou donner de la tête et devait continuellement changer de point d'attache.
Il possédait trois sabres aux noms significatifs, compliqués et japonais. Tous semblaient porter une malédiction, mais Zoro Roronoa n'en avait cure. Pour lui, seul importait que la lame soit effilée ; qu'elle est de la puissance et du caractère. Or, ses sabres le satisfaisait énormément de ce côté-là...
Une autre guigne poursuivait Zoro : une certain jeune femme, dont il n'avait jamais su le nom, qui faisait partie de la Marine Nationale (rien que ça !), s'était mise en tête de l'emprisonner. Pour ses crimes d'épéiste et ses crimes de pirate informatique. Elle était bien trop informée sur ses agissements ; il se demandait s'il n'avait pas un espion aux trousses. Mais cela lui semblait ridicule.
Ce jour-là, il avait décidé de souffler un peu : il venait de ruiner un certain boss de mafia, et l'affaire avait été ardue ; ce "parrain" avait ouvert de nombreux comptes sous divers faux noms - il avait fallu plus d'une matinée à Zoro pour tous les pirater.
Il alla se balader du côté du port, ses sabres pendant sur sa hanche, les mains dans les poches et une carte de la région à portée de main. En effet, il avait de légers problèmes d'orientation...
Près du phare, il s'accroupit au bord de l'eau et inspecta les alentours, de bonne humeur. Soudain, son ouïe affinée capta un mouvement dans son dos, qui se voulait furtif. Sur ses gardes, mais restant de marbre pour ne pas alerter son visiteur ; bien que sa nuque se soit raidie.
Une ombre le recouvrit et il se permit enfin de se retourner, le regard d'acier, sa main amorçant sur les sabres. Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu'il se retrouva littéralement nez à nez devant sa dingue de justicière, accroupie elle aussi, les yeux plissés de suspicion ; à croire qu'il pratiquait une activité illégale en toutes circonstances. Ses lunettes standards étaient sales de traces de doigts, son oeil clair et lucide le détaillait, ses cheveux noirs corbeau lui mangeant la moitié de son visage pâle... Elle aurait presque pu paraître mignonne aux yeux de Zoro si elle n'avait pas été si enquiquinante avec sa personne.
- Qu'est-ce que tu m'veux ? lui cracha-t-il tandis qu'ils s'affrontaient du regard.
- J'habite dans le phare, répondit-elle d'une voix calme et au timbre trop masculin pour une femme. Qu'est-ce que tu fais ici ? - Elle pinça les lèvres.
- J'ai le droit d'aller où je veux, ça ne te regarde pas, finit-il, échauffé par sa simple présence.
Il était juste parti se promener tranquillement, et le voilà qui se faisait agresser par une folle en uniforme.
- Je connais tes agissements ; tous sans exception. Et même si mes supérieurs restent sceptiques, je sais que j'ai raison. L'affaire Crocodile de ce matin, c'était toi, pas vrai ?
- Qu'est-ce que ça peut te faire ? grogna Zoro, se relevant ; elle fit de même.
- Cet homme était un haut fonctionnaire de l'état.
- Ce type était un mafieux qui détournait les fonds de la famille royale !
Elle haussa les sourcils, ahurie. Lui, au contraire, lui retourna un sourire vainqueur. 1-0. Elle se reprit.
- Et ce juge Baskerville qu'on a retrouvé gisant dans une ruelle de Londres il y a de ça un mois ?
Le visage du bretteur se ferma et s'assombrit soudain.
- Tu ne sais rien. - Sa voix grave résonna aux oreilles de la jeune femme comme le son d'un glaire.
La Marine frissonna. Puis, se détournant et commençant à s'éloigner, elle s'adressa à lui comme un signe de paix temporaire :
- Mon nom est Tashigi. Mon grand-père et moi habitons ici. Je ne suis pas là pour te poursuivre cette fois, tu peux partir.
Un profond étonnement se marqua sur les traits anguleux de Zoro. Elle le laissait vraiment s'en aller ? Ou allait-elle se retourner et empoigner son arme ?
Tashigi remonta la pente vers le phare, dans une démarche droite et raide. La nuit commençait à tomber sur la ville. Tout à coup, Zoro se sentit très fatigué et entreprit son chemin vers la masure qu'il occupait près du centre.
Tashigi... C'était un beau nom.
Il s'en rappellerait, aucun doute.